Frères, j’emploie ici un langage humain. Quand un homme a fait un testament en bonne et due forme, personne ne peut l’annuler ou lui ajouter des clauses. 16 Or, les promesses ont été faites à Abraham ainsi qu’à sa descendance ; l’Écriture ne dit pas « et à tes descendants », comme si c’était pour plusieurs, mais et à ta descendance, comme pour un seul, qui est le Christ. 17 Alors je dis ceci : le testament fait par Dieu en bonne et due forme n’est pas révoqué par la Loi intervenue quatre cent trente ans après, ce qui abolirait la promesse. 18 Car si l’héritage s’obtient par la Loi, ce n’est plus par une promesse. Or c’est par une promesse que Dieu accorda sa faveur à Abraham.
Ga 3, 15-18
Marcel Braekers
15-50
Dans cet extrait, Paul nous montre un bel exemple d'argumentation rabbinique. L'idée centrale est que la promesse d’alliance de Dieu avec son peuple et son histoire ne vaut pas seulement pour les Juifs mais s’applique bien à tous les peuples. Les Juifs ont justifié leur élection sur le fait qu'ils ont reçu les dix commandements par l'intermédiaire de Moïse et qu’ils ont essayé de garder ces commandements. Cependant, la promesse de Dieu remonte à Abraham, qui a vécu bien des siècles auparavant. Paul dit, en outre, que Dieu a fait cette promesse à Abraham « et à sa descendance ». Le mot est bien au singulier, ce qui implique que Dieu a fait cette promesse non pas à un peuple, mais bien à une personne. Pour lui, ce ne peut être que le Christ. De notre point de vue, ce raisonnement peut nous sembler quelque peu étrange. En réalité, il est typiquement rabbinique de construire tout un raisonnement sur un seul détail (le mot « descendance »).
Pour Paul, cette promesse était plus importante que la Loi. Elle lui donne même son propre sens. Promesse et Testament sont ici synonymes. Dieu a donc conclu une alliance avec Abraham et seul Dieu peut changer ce testament, pas les hommes. Le raisonnement est ici quelque peu compliqué, mais ce que Paul veut montrer, c'est que les Juifs doivent renoncer à leur attitude quelque peu chauvine comme peuple élu. Par le Christ, l'héritier d'Abraham, la grâce —une bénédiction— est donnée pour l’humanité entière. Il s’agit pour Paul de l’enjeu essentiel, parce qu'il y a maintenant une perspective où tous les peuples et toutes les races peuvent partager le même amour, dans une alliance universelle. Paul transcende ainsi tout nationalisme étroit et tout particularisme et montre un nouveau chemin d'amour sans limites..
Marcel Braekers
Heverlee